Après la parenthèse de Deauville, je reviens sur le Festival Silhouette que je n’avais pas totalement fini de vous faire partager. Cette 8ème journée est le jour des délibérations! Le Jury pro et étudiant se sont donc donné rendez-vous dans le QG de l’association à 10h30 afin de désigner les grands gagnants de cette 8ème édition du Festival Silhouette. On est enfin au cur de notre rôle de Jury. Pour les plus curieux d’entre vous, je vais plus ou moins vous dévoiler comment s’est passé notre délibération pour arriver au palmarès. Tout d’abord, sachez que tous les films projetés chaque soir n’était pas en compétition. Nous avions une sélection restreinte de 20 films qui sont identifiés par des étoiles dans les programmes distribués. Rien qu’avec ces 20 films, on a eu du mal à se mettre d’accord alors imaginez avec les 48 films projetés en soirée! Quoiqu’il en soit, assez rapidement, 4 films se sont détachés parmi le Jury étudiant: Je criais contre la vie. Ou pour elle, Liminal, Os sapatos de Aristeu et C’est gratuit pour les filles dont les affiches illustrent l’article.
Évidemment, chaque membre du jury avait son propre coup de cur ou au moins un film qu’il aurait préféré voir primer. Ensuite, tout n’est que compromis et force de persuasion. Et on ne restreignait pas non plus le choix à ces 4 possibilités. Selon la dimension qu’on voulait donner au prix et à la mention spéciale, certains courts tels que La Battue, Durand et Durant ou bien Ten:Thirtyone ont refait timidement surface. Pour ma part, mes tripes plébiscitaient Liminal et Je criais contre la vie. Ou pour elle et ma raison désignait C’est gratuit pour les filles comme vainqueur. À force de discussions et de re-visionnages pour bien faire les choses, chacun put exprimer les points forts et points faibles de chacun des films envisagés pour le prix du Jury Étudiant. On se met parfois d’accord sur certains points, beaucoup moins sur d’autres mais ce sont ces discussions qui font qu’au final chacun a compris le choix collectif. Plus qu’un simple vote à la majorité ce sont les arguments de chacun qui ont tranchés.
Environ 4 heures plus tard, sans même avoir pris le temps de déjeuner, le choix était pratiquement définitif. On pouvait enfin annoncer aux gagnants leur prix respectif. Mais ce n’est pas tout, aprèsles délibérations, ce fut l’heure des échanges avec les programmateurs et le Jury pro. Des échanges qui sont toujours intéressants vue leur implication dans le milieu. Cela fait plaisir de voir que certains films posent les mêmes interrogations quelque soit le public ou bien font ressentir des sentiments opposés selon l’il sous lequel on l’a vu. Ce fut au final une journée extrêmement enrichissante à tout point de vue. C’est con à dire mais mais j’ai ressenti une sorte d’unité dans la diversité. Berk! On dirait un vieux slogan contre la discrimination raciale mais je ne vois aucune autre façon de le décrire. On a tous eu un point de vue différent mais on est uni dans la volonté de comprendre celui de l’autre et dans la reconnaissance du travail des réalisateurs. Être jury dans ce festival a été une superbe expérience! Je le conseille à tous les étudiants cinéphiles, n’hésitez pas à postuler l’année prochaine ;).
La soirée de cette 8ème journée du Festival Silhouette a été consacré au focus Belgique. Les 6 films projetés sont vraiment excellents, pleins d’humour, d’humanité, de poésie, d’angoisse, de frustration, etc. On a vécu une soirée riche en émotions belges, la journée n’aurait pas pu mieux se finir. La sélection de ce soir a été pour moi exceptionnelle. Bien évidemment, c’est le meilleur du court métrage belge sur 15 ans donc il y avait intérêt que la sélection soit d’un niveau supérieur. J’ai hésité à venir et heureusement que je suis venu finalement. J’aurai pu rater un très bons moment avec le public. J’ai trouvé les rires beaucoup plus francs et spontanés, c’est vraiment comme ça que devrait se vivre toutes les projections en plein-air. Ce fut vraiment une excellente soirée qui compléta une excellente journée!
Le premier court métrage projeté dans le cadre du focus Belgique a été Tous à table d’Ursula Meier. Un film en noir et blanc qui relate la discussion d’une tablée affairée à élucider une devinette posée par un des convives. Une devinette assez simple: Il y a trois fourmis sur une souche d’arbre, la première dit: "Il y a 2 fourmis derrière moi, aucune devant." et la seconde dit: "Il y a 1 fourmi devant moi, 1 autre derrière moi". C’est alors que la troisième fourmi dit: "Il y a 2 fourmis devant moi et 2 fourmis derrière moi.". Comment est-ce possible? La famille entre rigolades et engueulades échafaude les théories les plus loufoques les unes que les autres. Et pendant les 30 minutes que durent le film, personne ne trouve la solution et qu’est-ce qu’on s’en fiche au final! On se délecte plutôt des situations dans lesquelles chacun des personnages se met dans leur rapport aux autres avec en particulier le formidable père qui se met à pousser la chansonnette dès qu’il y a un peu de tension dans l’air. 30 minutes de bonheur belge.
Gbanga Tita de Thierry Knauf est un documentaire beau dans sa simplicité. Quelque part en Afrique un homme raconte et chante les récits du début du monde. J’ai été littéralement transporté par ces 7 minutes. C’est là qu’on se rappelle la force des films à faire voyager à l’autre bout du monde. On est le témoin d’un moment particulier dans l’immensité qu’est le monde dans lequel on vit. Un film poignant qui fait relativiser pas mal de choses ;).
Alice et moi de Micha Wald est l’histoire de Simon qui conduit sa tante et ses amies à la mer. Ce dernier connait des problèmes avec sa copine et ces trois dames vont s’en mêler pour ne rien arranger. La très bonne narration du film et son découpage montrent une excellente maitrise dans le seul but de faire rire parfois de façon suggérée parfois de façon complètement évidente. Certains passages sont particulièrement inspirés au niveau de la réalisation comme le moment sur la photo ci-dessus où Simon sort la tête de la voiture pour conduire ou bien celui du montage photo où Simon pète un câble et conduit comme un dingue. Encore une fois, un très bon film plein d’humour. Trois films et déjà trois petites merveilles, c’est un très bon début de soirée!
Après la pause, le premier film à être projeté fut Qui veut la peau de Roberto Santini? de Jean-Julien Collette et Olivier Trollet. Le film avec ces airs du Terminal de Steven Spielberg et d’Amélie Poulain pour son côté fantastique, amuse sans vraiment convaincre. Je suis plutôt friand des films avec plusieurs vies qui s’entrecroisent mais ce film est trop évident. Pas vraiment d’effets de surprise ni de moment où on s’exclame "Ouaww, fallait le trouver celui-là!". C’est probablement le moins bons de ce focus sans pour autant être mauvais. Mais face aux trois précédents, il n’y a pas photo.
Meander de Joke Liberge est un concentré d’images et de sons assez singulier. Les mots n’ont plus de place quand tout est montré par l’image et le son. Ces adolescents qui s’amusent en silence au bord du lac sont tout le temps aux aguets. Le moindre plongeon est amplifié. Le passage d’un bateau fait même énormément monter la pression. J’ai été beaucoup plus sensible au son par rapport à d’autres qui ont trouvé les images beaucoup plus marquantes. Peut-être me faut-il le revoir encore une fois… En tout cas, le film est une réussite pour avoir transmis autant sans aucune parole avec seulement des images et du son.
Le dernier film projeté du Festival Silhouette 2009 a donc été Exoticore de Nicolas Provost: l’histoire dingue d’un immigré burkinabè en Norvège. L’incompréhension, la difficulté de s’intégrer à une culture, la solitude, etc. Nicolas Provost réussit à faire ressentir toutes ces difficultés. Je n’aime pas spoiler mais là je ne peux m’en empêcher. Il y a deux moments que j’ai trouvé excellents: lorsque le héros se met à crier dans la rue dans son dialecte et l’image du lion dans la ville constamment montré du doigt. Le film est une parfaite illustration de l’épreuve morale que subisse souvent les immigrés. C’est une sorte de documentaire artistique extrêmement bien travaillé, rien à dire.