L’histoire: Une soirée bien arrosée d’octobre 2003, Mark Zuckerberg, un étudiant qui vient de se faire plaquer par sa petite amie, pirate le système informatique de l’Université de Harvard pour créer un site, une base de données de toutes les filles du campus. Il affiche côte à côte deux photos et demande à l’utilisateur de voter pour la plus canon. Il baptise le site Facemash. Le succès est instantané : l’information se diffuse à la vitesse de l’éclair et le site devient viral, détruisant tout le système de Harvard et générant une controverse sur le campus à cause de sa misogynie. Mark est accusé d’avoir violé intentionnellement la sécurité, les droits de reproduction et le respect de la vie privée. Peu après, Mark crée thefacebook.com, qui se répand comme une trainée de poudre d’un écran à l’autre d’abord à Harvard, puis s’ouvre aux principales universités des États-Unis, de l’Ivy League à Silicon Valley, avant de gagner le monde entier… Cette invention révolutionnaire engendre des conflits passionnés. Quels ont été les faits exacts, qui peut réellement revendiquer la paternité du réseau social planétaire ? Ce qui s’est imposé comme l’une des idées phares du XXIe siècle va faire exploser l’amitié de ses pionniers et déclencher des affrontements aux enjeux colossaux…
Projet ambitieux que de s’attaquer à l’institution du web 2.0 qu’est Facebook. Je suis ressorti du film plutôt mitigé. Partagé entre le génie de certaines scènes et le fait d’être resté sur ma faim. Également partagé par le véritable objectif du film, est-ce un simple exposé des faits, une fiction inspiré de faits réels, en deux mots: quel est la part de fiction? C’est vraiment ce mélange qui m’a gêné pour apprécier pleinement le film lors de ce premier visionnage. Surtout que c’est l’inverse du mélange dont on a l’habitude, ce n’est pas un faux documentaire mais plutôt une fausse fiction. La réalisation, la musique et les dialogues sont autant d’éléments prouvant une réflexion esthétique flagrante. J’avais oublié l’espace d’un instant qu’il s’agissait de David Fincher et qu’il ne sait pas réaliser des films où je ne me dis pas que c’est tout simplement magnifique…. :p La bonne nouvelle donc c’est que le film est loin d’être anecdotique vu le nombre de fois où j’y ai repensé. Et plus j’y pense, plus je l’aime. Un deuxième visionnage achèvera de me convaincre je pense. Un deuxième visionnage où je n’aurai plus ces questions inutiles pour me distraire.
Une fois de plus, la réalisation de David Fincher est sans faille. Je serai toujours halluciné par son talent à nous faire ressentir immédiatement une ambiance particulière. C’était le cas dans l’Étrange histoire de Benjamin Button avec son ton à la fois historique et féérique, ainsi que dans Zodiac où on avait l’impression d’être dans un brouillard constant (parfaite ambiance pour un thriller soit dit en passant). Ici, c’est l’environnement universitaire élitiste bostonien et la folie technologique à la golden boy californienne qui sont parfaitement retranscrits. On s’y croirait vraiment et on n’a qu’une envie c’est de faire partie de ce monde. Du grand David Fincher! 😀 Mais ce n’est pas tout, la réalisation n’est pas le seul atout du film. La musique de Trent Reznor and Atticus Ross est juste extraordinaire! Ce mélange musical d’intrigues, de modernisme et de spectaculaire colle parfaitement au film. Une certaine oppression ou frustration transparait à travers la musique comme si à chaque instant quelque chose pouvait exploser. C’est une sorte de bouillonnement intérieur qui montre le petit bout de son nez de temps en temps. Ci-dessous un clip vidéo amateur très réussi avec la musique extraite de mon passage préféré du film i.e. la scène de la Henley Royal Regatta:
Comment parler du film sans parler des dialogues d’Aaron Sorkin. Dès la première scène d’introduction, on sait qu’on aura droit à un florilège de répliques plus incisives les unes que les autres. Le personnage du créateur de Facebook complètement déconnecté de la réalité de Mark Zuckerberg est immédiatement mis en place par sa façon de parler et de penser. Dépeint comme un génie incompris, le scénariste a pris un malin plaisir de jouer avec le contraste entre les conventions sociales et les propres convictions du personnage donnant des scènes assez géniales (spoiler: comme celle où l’avocat adverse lui demande s’il a toute son attention et que ce dernier lui répond clairement que non). C’est à peu près à ce moment de la critique que généralement je parle de la performance des acteurs et que je souligne l’excellent jeu d’un ou deux membres du casting mais je dirai pour une fois que tout le mérite revient au scénario. Comment avec de tels dialogues peut-on rater un rôle? Plutôt dur…. Les acteurs sont cette fois-ci éclipsés par le scénariste. Les acteurs n’ont pas su faire oublier la présence de ce dernier. Rappelons que l’excellence d’un scénario ne signifie pas forcément la mise en second plan des acteurs, il suffit de revoir Thank You For Smoking pour voir ce que c’est qu’un acteur qui s’élève au niveau de la qualité d’écriture.
The Social Network intéressera particulièrement les utilisateurs de Facebook et les fans de David Fincher. Il faut garder en tête que le film s’inspire d’une réalité mais qu’il reste une bonne part de mystère à toute cette histoire ne serait-ce que par la clause de confidentialité signée par Eduardo Saverin lors des faits. Ne pas non plus oublier que David Fincher fait des films pour le cinéma donc si vous vous attendiez à un téléfilm avec reconstitutions, vous allez être surpris (agréablement évidemment). The Social Network surprend donc par sa qualité d’écriture et son orientation cinématographique ostentatoire. Le duo David Fincher/Aaron Sorkin sortdes sentiers battus et nous livre une véritable histoire avec des "personnages" et non des personnes comme on pourrait se l’attendre. Une fausse fiction parfaitement écrite, réalisée et musicalement orchestrée.