Synopsis
En raison d’une épidémie de grippe canine, le maire de Megasaki ordonne la mise en quarantaine de tous les chiens de la ville, envoyés sur une île qui devient alors l’Ile aux Chiens. Le jeune Atari, 12 ans, vole un avion et se rend sur l’île pour rechercher son fidèle compagnon, Spots. Aidé par une bande de cinq chiens intrépides et attachants, il découvre une conspiration qui menace la ville.
Une histoire de dialogues
Wes Anderson s’amuse beaucoup avec ce film. Il joue avec le spectateur sur le procédé filmique même an utilisant avec humour le doublage des voix, les cartons et les flashbacks. Je n’en dirai pas plus pour ne pas vous spoiler les effets de surprise mais c’est très intelligent. Je ne ferai qu’une éloge du parti pris de ne pas doubler/traduire les dialogues des personnages humains mais seulement ceux des chiens. Il a recourt à des interprètes présents dans la scène pour traduire en direct les discours importants. ce dispositif qui peut paraître très artificiel permet une sorte de révélation émotionnelle dans une scène entre Atari (le personnage humain principal) et les deux chiens Spots et Chef. Une scène où Atari prononce sa ligne de dialogue sans que l’on ne comprenne un seul mot mais l’émotion est définitivement là. Peu importe de comprendre les paroles quand on comprend l’intention et l’émotion. C’est un peu la magie du cinéma qui est mise à l’œuvre ici, on est ému par la mise en image et non pas par la langue. Faire l’exercice avec un bouquin en langue étrangère aurait un résultat bien différent :p.
L'esthétique, l'esthétique, l'esthétique
Le scénario m’a immédiatement fait penser au court métrage Chienne d’histoire de Serge Avédikian que l’on avait diffusé au festival Silhouette en 2010 et qui a obtenu la palme d’or du court métrage au Festival de Cannes. Il suffit de remplacer dans le synopsis du court métrage la ville Constantinople par Megasaki :p. La bande-annonce du court métrage ci-dessous. Du coup, l’histoire ne m’a pas paru très originale mais il y a message et façon de délivrer un message. Connaissant maintenant le travail de Wes Anderson, je vais voir un de ses films surtout pour ses moyens de transmission par l’image que pour son scénario aussi alambiqué soit-il.
Un rythme millimétré
Au delà de l’image, une grande réussite du film est son rythme. Entre les percussions du taiko et les éternuements des chiens, il n’y a pas un seul blanc sonore sans que ce dernier ne soit voulu et millimétré. On retrouve l’ingrédient principal de la comédie et des humoristes: le timing. Le bon mot, la bonne expression ou le bon cut sur une autre scène ayant lieu au parfait moment sont très nombreux dans le film. C’est quand même fou qu’à chaque fois que l’on parle d’un film de Wes Anderson, sa maîtrise que cela soit dans le rythme ou l’esthétique revient sur le tapis. La maîtrise non seulement dans le sens de l’appropriation de son art mais surtout la poigne de fer qu’il impose sur son œuvre. Rien n’est laissé au hasard. On pourrait se lasser et même être énervé par ses plans symétriques et ses artifices mais on ressent « malgré » tout, et je dis bien « malgré » tout, beaucoup d’émotions.
Maîtrise du mouvement
Et bien évidemment, cela devient redondant à chaque fois qu’on parle d’un film de Wes Anderson mais l’animation est très belle. Au niveau visuel, rien à redire et au niveau fluidité également. Le style du réalisateur dont on a parlé précédemment, composé de tableaux soit en plans larges soit en gros plans sur les visages, aident. Le mouvement se fait plus au montage qu’à l’image. L’illustration parfaite en est les scènes de bagarre où un gros nuage statique représente le chaos de mouvements violents.
En conclusion, l’île aux chiens est sans aucun doute un film de Wes Anderson. Esthétisme, humour pinçant et sens du rythme, les fans du réalisateur ne seront pas perdus.
Sortie le 11 avril 2018.