L’histoire: Au milieu d’un désert, des spectateurs observent un pneu s’animer. Le pneu apprend à rouler, à surmonter des obstacles et surtout qu’il a la capacité de faire exploser des choses et des personnes par la simple force de sa volonté.
J’ai eu la chance d’assister à la première projection mondiale de Rubber et cela n’a pas été facile! Non seulement, il fallait obligatoirement avoir un pass prioritaire si on voulait espérer assister à cette séance spéciale mais en plus même en ayant un badge prioritaire, certains n’ont même pas pu rentrer. La petite salle de la semaine de la critique ne pouvaient tout simplement pas contenir la masse de curieux qui voulaient entrer voir le film. C’est donc avec une heure et quart d’avance qu’on a fait la queue et heureusement car finalement après que tous les VIP soient rentrés dans la salle, seule une poignée de personnes dont moi (:D) ont pu y accéder. Comme quoi, il faut mériter ses séances au Festival de Cannes mais plus de détails sur le festival en lui-même dans un article prochain. Passons maintenant à ma critique qui ne peut être que dithyrambique tellement j’ai apprécié ce violent délire.
Après l’excellent Steak, Quentin Dupieux revient avec Rubber, un OVNI cinématographique comme il s’en fait peu. De tout mon (trop court) séjour à Cannes, c’est indéniablement mon coup de cur de ce festival. Ce mélange de pureté esthétique et de folie dans le propos est absolument jouissif. Avec un scénario aussi barré, il faut tout de suite entrer dans le délire sous peine d’être laissé sur le carreau. Voilà pourquoi il faut souligner l’ingéniosité du réalisateur d’avoir introduit un faux public dans son film. Ainsi, des "spectateurs" peuvent exprimer à haute voix et non sans humour ce que le véritable spectateur lambda aurait pu penser. On est en quelque sorte guider dans nos réactions et c’est pas plus mal pour se mettre immédiatement dans l’ambiance. Et puis au cas où le spectateur avait une lueur d’espoir d’avoir un peu de logique dans ce film, le premier monologue balaie tout cet espoir en nous prévenant que le film est une apologie du "no reason". Alors, si vous pensiez voir un film avec une explication, des causes et des conséquences, passez votre chemin!
Concernant la photographie du film, loin de vouloir s’excuser de son esthétique parfaite, Quentin Dupieux en fait un jeu. Ainsi, la première scène ressemble à une photographie d’art contemporain remplie de symboles forts et des sens cachés: des chaises noires sont stratégiquement placées sur une route au milieu du désert. C’est alors qu’arrive une voiture qui très lentement et une à une renverse mécaniquement ces chaises. La destruction de cet "art"si parfaitement installé annonce déjà la couleur d’auto-dérision que va prendre le film. Le décor composé principalement d’un désert, d’une route et d’un hôtel est simpliste comme l’ambition qui est de nous faire délirer et rire tout simplement.
Les moins sensibles à cet univers reprocheront le long format du film et avancerait même la folle théorie que Rubber aurait été mieux en court métrage (Oui, oui, Garko, c’est à toi que je fais référence). Grave erreur! Comment se passer d’une seule scène de ce délire chronométré à la seconde près. Chaque acte a son summum mais chacun de ses points culminants doivent être amenés méthodiquement et c’est là tout l’intérêt du long format. Cette maîtrise du sens de la narration se fait en longueur et on aurait perdu bien des choses si le film avait été un court métrage.
Pour aborder un aspect plus technique, il convient de parler du héros du film qui n’est autre que le pneu Robert! En effet, technique dans le sens où la technique utilisée pour l’animer est un véritable mystère. Une sorte de mécanisme qui utilise la gravité, un pneu entièrement digitalisé? En fait, cela n’a aucune importance! On y croit et surtout on a envie d’y croire. Les effets spéciaux sont uniquement un support à l’histoire et certains ghost-busters… oups je veux dire blockbusters l’oublient. Le réalisateur ici ne l’a pas oublié et cela fait bien plaisir de le voir. Un chapeau pour toute la séquence d’apprentissage du pneu, tout simplement classique.
Pour finir, un mot sur les acteurs "secondaires". Même si Robert joue son rôle à la perfection, il ne faut pas oublier la participation de Roxane Mesquida et Thomas F. Duffy qui sont sublimés dans ce film. De par sa photogénie pour l’actrice et par son hilarité pour l’acteur. Le monologue du shérif adjoint Xavier au début du film est à mourir de rire et chaque plan avec Roxane Mesquida est artistiquement pensé, des passages dans la voiture à celui de la piscine.
Et la musique aussi!! J’allai oublier. Subtile quand il le faut et bourrine quand il est nécessaire de l’être. Je réalise que je pourrai parler des heures et des heures de ce film alors qu’il suffit que vous le voyiez pour comprendre (ou pas parce que finalement, "no reason"). Ce qui est sûr c’est que le film laissera sa marque et deviendra certainement culte! J’ai vraiment hâte de le revoir lors de sa sortie en salles le 15 septembre prochain!